Le conseil municipal d’une commune argovienne modifie son règlement communal sur l’eau dans le but de convertir les compteurs d’eau conventionnels en dispositifs intelligents. Le 30 octobre 2017, un tel compteur est installé chez un citoyen, compteur qui mesure en continu la quantité d’eau consommée et collecte puis conserve localement (pendant 252 jours), des données horaires concernant l’état de l’alarme, le relevé du compteur ainsi que le débit minimal et maximal mesuré. Ces données chiffrées sont émises par radio toutes les 30 ou 45 secondes pour être accessibles à une certaine distance par l’intermédiaire d’un dispositif protégé par un mot de passe. Cela permet au fournisseur d’eau de traverser un quartier et de récolter ces données. Une valeur unique de consommation est quant à elle récoltée une fois par an par le fournisseur, à des fins de facturation.
Un citoyen s’oppose, sans succès, à l’installation de ce compteur intelligent devant les autorités communales, puis cantonales. Parallèlement, il agit devant le Préposé cantonal à la protection des données et à la transparence, lequel conseille l’usage d’un compteur mécanique, respectivement d’un compteur intelligent, dont l’émission radio des données est désactivée ou qui soit paramétré par défaut de manière favorable au respect de la vie privée. Débouté par le Tribunal cantonal argovien, le citoyen saisit le Tribunal fédéral en invoquant le respect de sa vie privée.
Le Tribunal fédéral admet que les données relatives à la consommation d’eau peuvent être qualifiées de données personnelles.
Le Tribunal fédéral admet le recours. Il considère que les données relatives à la consommation d’eau peuvent être qualifiées de données personnelles. Leur traitement dans un but de facturation est conforme au droit à l’autodétermination informationnelle du citoyen. Tel n’est pas le cas de leur collecte, de leur conservation pendant 252 jours sur un compteur d’eau et de leur émission par radio toutes les 30 ou 45 secondes, sans but défini. Ce processus est contraire aux principes de l’évitement et de la minimisation des données et constitue par conséquent une atteinte disproportionnée au droit constitutionnel du citoyen à la protection de sa sphère privée. La commune devra donc envisager d’autres pistes de réflexion, dont la désactivation de la conservation interne des données ou la mise en place d’un autre dispositif conforme au principe de la proportionnalité.
Cet arrêt signifie que les collectivités publiques qui n’ont pas adopté de règles légales et/ou celles qui ont défini trop largement la collecte et la conservation des données doivent revoir immédiatement leurs pratiques. Les citoyens seraient quant à eux bien inspirés de se renseigner sur le sort des données qui les concernent.
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