Parmi les grandes qualités dont se prévaut la plus vieille démocratie du monde figure la procrastination politique. En bref, avant de décider il faut donner du temps au temps. Si cette appréhension de la gestion des problèmes pouvait, par le passé, s’avérer une preuve de maturité, avec la fulgurance et l’interconnectivité actuelle, il faut constater que les agneaux sacrificiels générés par cette indolence politique se multiplient.
Dernier exemple en date avec le cyberharcèlement, soit le comportement consistant à s’en prendre à une personne pendant une certaine durée via Internet ou un smartphone dans le but délibéré de la blesser, de la menacer, de l’humilier ou de la harceler. Voici quelques exemples : diffuser des informations erronées ou de fausses rumeurs ; créer un faux profil au contenu blessant : diffuser des photos ou des vidéos dolosives, falsifiées ou dénudées ; injurier, harceler, menacer ou exercer un chantage par email ou par sms… Selon une récente étude de l’Université de Zurich, un quart des jeunes ont reconnu avoir été victimes au moins à une reprise de ce phénomène.
Un quart des jeunes ont reconnu avoir été victimes au moins à une reprise de ce phénomène
Le cyberharcèlement ne fait pas l’objet d’une norme pénale spécifique en Suisse. Différentes infractions peuvent toutefois être identifiées et constituées en fonction des comportements adoptés (accès indu à un système informatique, détérioration de données, extorsion, chantage, diffamation, calomnie, injure, soustraction de données personnelles, menaces, contraintes, etc.). Il s’avère toutefois, en pratique, difficile de poursuivre les auteurs. La jurisprudence rendue a, en effet, associé les éléments constitutifs de l’infraction, comme la contrainte, à des actes particuliers générant un certain résultat. Le cyberharcèlement consiste plutôt en une série d’actes et d’attitudes ayant de concert un effet sur la victime.
Les différents actes répréhensibles devraient dès lors être décrits aussi précisément que possible dans les dispositions à créer. C’est l’avis de la Commission des affaires juridiques du Conseil national qui a donné suite à une initiative parlementaire en ce sens.
Le code pénal doit, selon l’initiante Gabriel Suter, être maintenu à jour et doit définir de manière claire les infractions liées aux nouveaux phénomènes sociaux. Ce n'est qu'ainsi qu'il pourra aussi avoir un effet préventif.
Il faut espérer, à l’aune du nombre de personnes victimes de cyberhacèlement, que cette initiative conduise à une rapide modification législative. À titre exemplatif, l’Allemagne qui dispose du modèle le plus avancé en cette matière punit non seulement les auteurs, mais également les réseaux sociaux d’amendes qui peuvent s’avérer colossales (50 millions d’euros) en cas d’absence de retrait de publications signalées par les usagers dans les 24 heures.
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