En cette période estivale, je vais vous présenter une affaire qui peut apparaître anodine, mais dont les conséquences, au quotidien, s’avèrent désormais décisives dans un grand nombre de procédures.
Les magistrats et les avocats n’ont pas (encore) acquis le réflexe d’exploiter les données figurant dans les véhicules, mais cela ne saurait tarder et différents litiges verront leur issue déterminée par ces sycophantes digitaux. Car, à l’évident, l’endroit où notre comportement fait l’objet d’une surveillance constante, invasive et souvent ignorée est le siège conducteur de tout véhicule automobile.
Le 12 février 2023, un citoyen fribourgeois a sollicité en se fondant sur les normes cantonales en matière de transparence (loi du 9 septembre 2009 sur l'information et l'accès aux documents) de la Police cantonale de pouvoir consulter l’enregistrement des données du dispositif de stockage des données d’une voiture de police, sur les 10 secondes précédent l’accident intervenu avec sa propre voiture. Le but est évident : déterminer le champ des responsabilités. La police a refusé l'accès au document, mais a communiqué à la requérante des informations sur les données enregistrées. Le citoyen ne s’en est pas laissé compter et a saisi la préposée cantonale à la transparence. Rappelons qu’une telle procédure est gratuite, simple et rapide. La médiation ayant échoué, une recommandation a été émise.
Le document souhaité est l'enregistrement des données de l'appareil de stockage des données d'une voiture de police, conformément à l'article 102 de l'ordonnance concernant les exigences techniques requises pour les véhicules routiers
La requérante s'intéresse en particulier à la vitesse, à l'état des feux de stop et des clignotants de direction, à l'état des feux bleus et de l'avertisseur à deux tons alternés et à l'état des feux de croisement.
Selon la préposée, il s’agit d’un document officiel, produit par la police dans le cadre de ses tâches. Il a atteint son stade définitif d’élaboration et ne fait pas l’objet d’une utilisation personnelle, ni d’une utilisation exclusive comme moyen auxiliaire. En bref, sur le principe, il est accessible.
Une procédure pénale opposant la requérante à la police cantonale, se pose finalement la question de savoir si la procédure empêche la communication du document officiel. Se référant à la jurisprudence du Tribunal fédéral, la préposée considère qu’il n’en est rien dès lors que le document a été établi avant la procédure.
Cette recommandation du 10 mai 2023 va inspirer différentes interactions. Les avocats vont solliciter la production précise des données topiques dans les procédures civiles, pénales et administratives. Le ministère public aura également tendance à les solliciter d’office des constructeurs. Et pour les conducteurs, désormais plus de droit à l’erreur. Le hic c’est qu’entre ce que nous ressentons, appréhendons ou considérons et la réalité des données, une discrépance notable peut survenir. Prudence donc.
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