Le titre vous choque ? Assurément. Mais à la lecture de l’état de fait, vous allez comprendre. Il s’agit en réalité d’un litige familial d’une acuité certaine. La maman de trois enfants mineurs a signifié à réitérées reprises à la grand-mère qu’elle ne souhaitait pas voir des photos d’eux être publiées sur les réseaux sociaux. Nonobstant cette invitation à s’abstenir, la grand-mère a persisté, ce qui a provoqué la saisine du Tribunal.
Il a alors été requis qu’il soit fait interdiction à l’avenir à la grand-mère de publier d’autres photos des enfants sur les réseaux sociaux et qu’elle soit astreinte à supprimer immédiatement les photos déjà publiées, sous peine de 250 euros d’amende par jour de retard. Étaient invoquées à l’appui de cette requête les normes néerlandaises en matière de protection des données. En bref, la grand-mère aurait violé la loi en publiant sans autorisation des photos d’enfants mineurs. Il s’agirait d’une grave atteinte à la vie privée des enfants.
La grand-mère a, quant à elle, reconnu avoir publié les photographies de ses petits-enfants sur sa page Facebook. Elle a déclaré au tribunal avoir retiré les photographies litigieuses, à l’exception de l’une d’entre elles, soit celle de l’enfant plus âgé avec qui elle avait noué une relation d’une grande intensité.
Le Tribunal, après avoir remarqué que d’autres photos figuraient sur le réseau social Pinterest, a considéré que les normes en matière de protection des données avaient été violées du fait de l’absence d’autorisation de la mère s’agissant de photographies de mineurs de moins de 16 ans. Il a donc été ordonné à la grand-mère de supprimer les photos des enfants de Facebook et de Pinterest. Interdiction lui a également été faite de publier à l’avenir de telles photographies. L’aspect émotionnel du partage n’a pas été retenu comme pertinent.
Une telle situation pourrait-elle se produire en Suisse ?
Absolument. Il y a toutefois un bémol qui mérite notre attention. Le Tribunal néerlandais a tenu compte du fait que les paramètres de confidentialité des comptes de la grand-mère n’avaient pas limité la visibilité des images à un cercle familial ou à des amis proches. La solution eût donc pu être différente, si les images n’avaient pas été accessibles au plus grand nombre.
Les enfants agiront-ils bientôt contre leurs parents pour faire retirer des photos d’enfance qui leur déplaisent ? Rien n’est moins sûr. Dans de telles circonstances, le dialogue et l’écoute sont vraisemblablement les meilleurs remèdes à ces aléas de l’existence si chers à Cioran.
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